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Les médecins dénoncent les plans régionaux d'effectifs médicaux
Émilie Côté
La Presse
Il faudra s'y faire, la pénurie de médecins ne sera pas réglée avant 2015. Mais le gouvernement aggrave le problème en diminuant le nombre de médecins dans les hôpitaux universitaires pour les mettre en poste en région. La Fédération des médecins spécialistes et la Fédération des médecins résidents du Québec sonnent l'alerte.
En conférence de presse, la FMSQ et la FMRQ ont remis en question les plans régionaux d'effectifs médicaux (PREM). Depuis 2003, le ministère de la Santé produit un plan chaque année afin de répartir équitablement les médecins dans la province.
Les fédérations admettent qu'il y a une pénurie de médecins, autant dans les centres universitaires que dans les hôpitaux éloignés des grands centres. «C'est une réalité que nous ne pouvons pas changer, soutient le Dr Gaétan Barrette, président de la FMSQ. Mais on ne peut pas résoudre les deux problématiques en même temps.»
Dans le PREM de 2007, on annonce que des départs ne seront pas remplacés dans les hôpitaux universitaires, au profit de postes en région. «L'objectif est louable, mais la conséquence est grave», avertit le Dr Barrette. Si un enfant de l'Abitibi souffre de leucémie, il sera traité à Sainte-Justine, même s'il y a un pédiatre de plus à son hôpital, a-t-il illustré. «Il ne faut pas juste placer un pédiatre en région. Il faut une équipe et un milieu d'expertise», a ajouté la Dre Thérèse Côté-Boileau, présidente de l'Association des pédiatres du Québec.
La FMSQ craint particulièrement pour les services universitaires de pédiatrie, d'anesthésie, de radiologie diagnostique et d'hémato-oncologie. Le Dr Barrette parle «d'effet domino». «Ce sont des spécialités qui sont pivots dans un hôpital. Dès que vous touchez à ces spécialités-là, vous diminuez l'offre de service pour la population de la région, et conséquemment, pour la population du Québec.»
Les PREM nuisent également à la formation des nouveaux médecins, souligne le Dr Martin Bernier, président de la FMRQ. Chaque année, le ministère de la Santé dévoile son plan trop tard, «rendant impossible la planification de recrutement».
«Depuis quelques années, c'est devenu pratique courante que les médecins qui sont sur le point de prendre leur retraite s'entendent avec leur résident remplaçant», poursuit-il. Avec le nouveau PREM, le médecin sortant doit remettre sa démission, effective le 30 novembre de l'année en cours. «On ne peut pas demander à un médecin qui pratique de démissionner cette année, parce que cette année, on recrute un résident, qui lui, va partir en fellow (surspécialisation clinique) et revenir dans deux ans, a commenté le Dr Barrette. On crée un trou de deux ans dans les effectifs, donc on baisse les services.»
Promesses libérales
En conférence de presse, le Dr Barrette a également commenté la promesse libérale d'embaucher 1500 médecins d'ici 2012. Ce n'est pas une promesse, considère-t-il, mais une réalité. «Selon l'annonce, essentiellement, les étudiants en médecine qui sont actuellement dans les programmes vont réussir leur examen. On est très content, ironise-t-il. C'est comme nous annoncer que, pour les cinq prochaines années, le soleil va se lever tous les matins... à l'est!»
Jean Charest promet également aux Québécois la garantie d'être opérés dans un délai de six mois. Pour cela, il faudra plus de lits, donc plus d'argent, plaide le Dr Barrette. «Le bloc opératoire est la première chose qui ralentit dans un hôpital quand l'urgence déborde. L'urgence déborde car il manque de lits aux étages.»
«Est-ce que la santé est vraiment une priorité pour nos politiciens durant la campagne électorale?» s'interroge le président de la FMSQ.
Seul le Parti libéral a affirmé que la santé était sa priorité, signale le radiologiste. «Mais il a annoncé le statu quo budgétaire. C'est clair qu'il n'y aura pas d'amélioration dans le système de santé.»